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La lutte, ce sport-spectacle au pouvoir rassembleur

Avant d’aller dans le vif du sujet, je veux mentionner que dans mon quotidien, je prône la non-violence, l’amour, le respect et la compassion. Pour développer au maximum ces valeurs, je mets en pratique la méditation de pleine conscience, et au moins une fois par année, je m’oblige à suivre un 10 jours de méditation en silence, loin du vacarme de la ville.  Constamment, je suis dans la quête d’une paix totale avec moi-même et avec l’humanité.

Bref, je hais la haine. Et vendredi dernier, je m’y suis frôlée, je l’ai côtoyée. Je suis sortie volontairement de ma route vers la sérénité pour la rencontrer là où elle se déploie à son état le plus brut, c’est-à-dire dans un ring de lutte.

Donc, vendredi le 18 août, après mon quart de travail, je me rends coin Joliette et Adam. Dans le sous-sol de l’église a lieu la lutte I.C.W Wresting. À l’extérieur, je me sens (déjà) intimidée par les gens. Dans leur face, j’ai l’impression de lire : « Coudonc la p’tite s’est-tu trompée de place? » Bon, bon, c’est peut-être juste dans ma tête. Je cherche du regard l’entrée vers le show. Of course, tel un cliché de roman à deux balles, deux gars assez costauds bloquent le fameux passage. Je prends mon courage à deux mains et dans un souffle je lance : « Hey! c’t’ici la lutte? » L’un d’eux me dévisage, se tasse et me répond : « Ouais ouais, c’est ici ».

Je descends les marches et j’atterris au sous-sol de l’église. En plein centre, j’aperçois un ring éclairé par des spotlights. Après avoir acheté mon billet, je décide de m’asseoir à l’arrière complètement, pour me laisser une vue sur l’ensemble. Près du ring, les chaises en métal sont déjà prises par des habitué(e)s. Il y a peut-être 100 personnes d’installées, puis après 10 minutes, un monsieur de la sécurité place des chaises pour accueillir une soixantaine de nouveaux arrivants.

Bon. Ça commence. On accueille les lutteurs pour le premier match. Les rituels embarquent : les gens des premières rangées se collent au ring, certains acclament, d’autres huent les lutteurs, et on ne se gêne pas pour lancer allègrement des doigts d’honneur. C’est le vacarme, le chaos. On entend de la musique assourdissante. Les cris de la foule. Des voix inaudibles dans des micros. Des sacres. Des sacres. Et encore des sacres. C’est violent. Une boule pleine d’inconfort se forme au niveau de mon thorax. Je prends des respirations et j’essaie de regarder tout ça d’un œil épuré, sans jugement, mais ma tête me crie sans arrêt : « J’aime pas ça, allons-nous-en ». Tout est froid, même le sous-sol de l’église dégage un froid humide qui rentre jusque dans mes os.

Mais les gens ont du fun! La gang juste à côté de moi est formée de travailleurs dans la fin vingtaine, début trentaine. Il y a un gars de la gang qui tripe d’envoyer promener un lutteur qui lui renvoie la pareille, et les gens s’amusent de leur querelle. Lors de la première pause, je demande à la fille assise à côté de moi (faisant partie du groupe en question) si c’est la première fois qu’elle vient.

– En fait c’est la deuxième fois. On vient ici avec la gang de la job, ça fait notre sortie, pis ça sort de l’ordinaire!
 

Sortir de l’ordinaire, oui ça, je lui l’accorde! J’essaie de me rentrer dans la tête que c’est un show. Juste un show tout ça. Puis, je tente de prendre des vidéos du match, mais rapidement un monsieur de la sécurité vient m’interdire la prise de photos et de vidéos. Je lui réponds tout de suite :
 

– Mais j’écris un article pour promouvoir le match qu’il va avoir lieu à la Vente-trottoir de la Rentrée.

– Ouais peut-être, mais moi j’ai pas entendu parler de ça, pis ici c’est interdit de filmer ou de prendre des photos.  

– J’aimerais parler à celui qui organise ça.

– Y’est en arrière mais y’est ben occupé.

 

À deux reprises, à la pause, je vais le revoir pour lui demander de m’amener à lui, mais il veut rien savoir. Bon, j’abandonne, mais c’est pas vrai que je vais me contenter de regarder. Telle une ninja, je réussis à filmer et à prendre quelques clichés en douce.

À un moment, il y a la rencontre de 6 ou 7 lutteurs sur le ring, je n’arrive pas à comprendre ce qui se passe (comme tous les matchs en fait, puisqu’on n’entend absolument rien avec l’écho des micros). Toute la foule se met ensemble et gueule : « Gros jambon! Gros Jambon! Gros jambon! » Je comprends que l’insulte va au lutteur souffrant d’embonpoint. J’ai un serrement au cœur, une surdose d’empathie et d’incompréhension face à ce comportement.

 

Petit topo sur la violence appliquée au phénomène de la lutte

 

1 – Tout d’abord, l’humain est constamment dans la dynamique du « nous » contre le « vous », c’est-à-dire que son sentiment d’appartenance à un groupe lui est nécessaire, et il a besoin d’en être fier. La violence dans la lutte mobilise la foule, et elle unifie le groupe.

2 – Ensuite, la lutte comporte des similarités avec le théâtre, par exemple elle détient la même fonction cathartique. En d’autres mots, elle permet à la foule de libérer sa passion débordante accumulée au fil du temps (les majeurs pointés vers le ciel en sont une preuve).

3 – Puis, le combat de lutte raconte une histoire, où le bien et le mal s’affrontent. La foule à besoin d’un héros. Au Québec, avant Maurice Richard, c’était Yvon Robert l’idole sportive qui rassemblait le peuple québécois, surtout devant la télévision.  

 

La lutte, finalement, permet, par les dialogues de rassembler la foule (et les lutteurs entre eux), de libérer de nombreux tabous et de laisser les spectateurs faire partie du spectacle.

 

J’admire ces gens qui se sont laissé aller, qui ont joué le jeu, car tout ça en est un au final. D’ailleurs, à une pause, je suis debout au centre, un homme passe près de moi et me dit : « Pis, comment tu trouves ça, la lutte? » Je lui ai dit que je ressens un malaise, surtout par toute cette violence. Je remarque qu’il a des collants, et je fais le lien que c’est un lutteur qui vient de performer. Avec un sourire très chaleureux et serein, il me lance : « Dis-toi qu’on prend tous une bière après ensemble ». Des enfants courent autour de lui et il me souhaite une belle soirée. (Ça sonne cul-cul, mais ça c’est réellement passé comme ça!)

Je vous invite à assister au match de la fédération I.C.W Wresting qui aura lieu à la Vente-trottoir de la Rentrée et de développer votre opinion sur ce sport-spectacle, si vous êtes peu habitués comme moi. Mon hypersensibilité et moi y serons. Pas devant, oh non, mais plutôt en arrière. Nous y serons à examiner la foule et ses comportements, si fascinants, et si troublants à la fois.

 

 


Crédit photo : Anne-Marie Brien

PRÉSENTATION DE MEGGIE DESCHAMBAULT, Contemplatrice des p’tites choses d’Hochelaga

https://www.instagram.com/magouille_md/

Un jour, faute de papier à ma disposition et bouffée par le stress, j’ai juste crié « je t’aime » à mon kick. Littéralement. Et ce, dans la piscine à vagues de Bromont.

C’est à partir de ce moment, à 13 ans, que j’ai réalisé que je ne ferai jamais carrière comme oratrice. Tant mieux, parce que ce dans quoi j’étais vraiment à l’aise, c’était dans la rédaction. Aujourd’hui, dès que j’ai des palpitations pour un autre humain, une quelconque anecdote ou un bout d’histoire en tête, j’écris. C’est la même chose si je dois parler à quelqu’un sur un sujet important. Sinon, sans préparation, ça sort complètement tout croche de ma bouche, comme le démontrait parfaitement ma déclaration d’amour (by the way, j’ai jamais eu de nouvelles de toi, Jeffrey, mais c’est correct, j’te pardonne).

Depuis un an et demi, j’emprunte les rues et ruelles d’Hochelaga, certaines plus banales, à la découverte de télévisions échouées, de graffitis féministes, de conversations Not Safe for Work, etc. La timide extravertie que je suis déniche toujours quelque chose de nouveau, d’inspirant et parfois, d’un peu trash qui pimente mes écrits. Une anecdote n’attend pas l’autre, et j’ai bien hâte de vous en faire part!